L'Esprit de la ruche

El Espíritu de la colmena

Victor Erice, Espagne, 1973, Carlotta

Commentaire

Dans cette double séquence, le réalisateur joue de la répétition et de la différence entre deux scènes identiques. Le premier jour, les deux sœurs s'arrêtent à distance d'une bergerie en ruines sur le chemin de l'école. La plus grande sœur, Isabel, a raconté à la plus petite, Ana, que c'est là que vit le monstre de Frankenstein qu'elles ont vu lors d'une projection ambulante de cinéma.

Dans le premier volet, la caméra reste immobile, avec Ana, loin de la bergerie. Isabel dit quelque chose à l'oreille de sa sœur avant de s'éloigner d'elle vers la bergerie. Le réalisateur nous cache ce qu'elle lui dit, que nous n'entendons pas. Isabel s'approche alors du puits et regarde vers le fond, mais nous ne savons pas ce qu'elle voit. Puis elle entre dans la bergerie et disparaît au regard de Ana et du spectateur. Là encore Erice nous cache ce qu'elle fait et ce qu'elle voit. Quand Isabel rejoint sa petite sœur, elle lui dit à nouveau quelque chose, sans doute sur ce qu'elle a vu, que nous n'entendons pas. Dans le deuxième volet, Ana revient seule au même endroit pour savoir ce que sa sœur a vu et qui lui a été caché, comme à nous. Elle se penche sur le rebord du puits et voit l'eau noire qu'elle brouille en y jetant une pierre. Puis elle entre dans la bergerie et le cinéaste, par un panoramique subjectif de son regard, est censé nous montrer ce qu'elle y voit. Mais quand son regard arrive vers la gauche de la pièce, plongée dans l'obscurité, ce qui nous est montré nous est caché par le noir. Le mystère du non-vu reste entier, même si Ana regarde.