Caprice en couleur

Begone Dull Care

Norman McLaren, Evelyn Lambart, Canada, 1949, Office national du film

Commentaire

Quand Norman McLaren entreprend la réalisation de son film en 1948, il a déjà fait une bonne trentaine de courts métrages où il a expérimenté toutes sortes de techniques d’animation. Comme Len Lye avant lui, il a dessiné et peint directement sur la pellicule 35mm transparente et il a gravé sur la pellicule noire. McLaren a aussi utilisé des procédés optiques (le Vitacolor, puis le Warnercolor) pour transformer en couleurs un dessin noir sur fond clair.

Dans Caprice en couleur, il va combiner toutes ces techniques avec jubilation et en essayer de nouvelles. Sur certains segments, il applique la couleur de base avec un pinceau directement sur la pellicule en mouvement sur la Moviola, au rythme de la musique du trio d’Oscar Peterson. Dans une autre section du film, avec sa collaboratrice de longue date, Evelyn Lambart, McLaren va appliquer toutes sortes de teintures (disons jaune) en tendant la pellicule sur un long rail de bois de 4 mètres de long qu’il a fabriqué exprès. Une fois l’encre séchée, ils en remettent une couche d’une autre couleur (disons bleu) sur l’autre face en retournant la pellicule sur son rail. Ensuite, il grave les dessins, image par image, qui apparaîtront jaune ou bleu sur fond vert, dépendant de quelle couche d’encre a été enlevée. La synchronisation parfaite entre le piano de Peterson et les figures peintes, gravées ou dessinées sur la pellicule est obtenue grâce à la retranscription à la main de la partition musicale sur une longue feuille de tournage (dope sheet) précise au 24ième de seconde. Toutes ces techniques demandent une maestria d’artisan, de graveur, de patenteux, d’imprimeur difficile à imaginer aujourd’hui. Le jeune McLaren souffrait de synesthésie, l’artiste se sera servi toute sa vie, comme ici, de cette hypersensibilité pour faire entendre la couleur.

Mot-clés

peinture sur pellicule.