Du côté d'Orouët

Jacques Rozier, France, 1973

Commentaire

Aucun enjeu fictionnel dans cette scène de promenade sur la plage, le réalisateur semble prendre plaisir à utiliser l’écran comme une toile sur laquelle il dispose les silhouettes de ses personnages. Il choisit une échelle de plan assez large pour pouvoir embrasser à la fois le ciel chargé, qui se reflète sur la grève, et la mer. La caméra très mobile, les fréquents changements d’axe, permettent de saisir les effets imprévisibles d’une lumière et d’un ciel très changeants, dans des nuances multiples de bleu et de gris, elle précède légèrement les trois personnages dont les corps sont en prise directe avec les éléments : le vent qui soulève les manteaux et les foulards, étouffe les voix et les contraint à crier pour se faire entendre, l’eau qui monte et ralentit leur marche, le froid. Les comédiennes semblent improviser un dialogue dans lequel il est question du temps, d’une tempête qui menace. Rozier décide des plans sur place : ainsi à la fin de la séquence, il décide d’accompagner jusqu’aux bout les filles qui remontent les marches afin de saisir l’image du nuage blanc qui se forme sous nos yeux entre les deux bâtiments. Comme chez Rohmer, le choix d’une économie très modeste de tournage permet à Jacques Rozier d’être sensible et réactif aux aléas météorologiques.